Quantcast
Channel: Les commentaires de Poesie-Bettina sur Pointscommuns.com
Viewing all articles
Browse latest Browse all 2

Sophie Scholl les derniers jours : Des pétales pour renaître

$
0
0
Image de deux jeunes filles de 21 ans chantant en tête à tête des chansons américaines à la mode des années quarante, en souriant, légères et insouciantes. Image du couperet d'une guillotine s'abattant sur la nuque de l'une d'entre elles, après un cri déchirant poussé dans une geôle nazie. Voici les deux portes, les deux branchies, qui ouvrent puis ferment le film allemand (2006) de Marc Rothemund, scénario de Fred Breinersdorfer, rediffusé ce jeudi 7 octobre au soir sur Arte : "Sophie Scholl, les derniers jours". Entre les deux : un groupe de jeunes gens (groupement militant de "La Rose Blanche") s'activent nuitamment près d'une machine à imprimer des tracts. Sophie (jouée magistralement par l'actrice Julia Jentsch), et son frère étudiant en médecine, arrivent tôt, un matin, pour poser des piles de ces tracts en les répartissant un peu partout dans les couloirs des étages de leur Université. Tracts qu'ils ont apportés dans une valise - "celle que j'emmène à chaque fois pour transporter mon linge à laver chez ma mère", dira plus tard Sophie lors des interrogatoires serrés menés par la Gestapo. Tandis qu'ils sont surpris par la sonnerie annonçant l'entrée en foule des étudiants de l'Université, Sophie lance du deuxième palier un paquet de tracts anti-hitlériens qui se répandent dans le hall comme des pétales de liberté sur ses semblables. Il faudrait parler ensuite des entretiens drastiques, menés en bureau clos, où un membre de la Gestapo, pourtant implacable, bascule peu à peu subtilement pour proposer un procès verbal "aménagé" à celle, si jeune, qui pourrait être sa fille ; du séjour en cellule de Sophie avec une militante communiste emprisonnée missionnée pour l'empêcher de se suicider ; de l'adieu final aux parents fiers de leur fille ; et, bien entendu, du procès éclair et fantoche, où Sophie, seule femme de l'assistance, dans une fulgurante anticipation de l'Histoire, s'écrie devant l'armée d'hommes et de juges au bras dressé : "Bientôt vous serez à notre place, ici, sur le banc des accusés". Mais, pour ma part, je préfère concentrer le film, telle une super nova, en quelques phrases chocs et clés. "Sans loi, pas d'ordre. À quoi peut-on se fier si ce n'est à la loi ?" demande le nazi. "À sa conscience", répond Sophie. Puis elle poursuit : "La loi change, la conscience non." "Personne ne peut savoir ce qu'un lot de souffrances répétées peut créer de richesses dans un être". "Les êtres supérieurs ne veulent que la paix et la dignité humaine". "Personne n'a de plus grand amour que celui qui sait offrir sa vie pour ses amis". Le père de Sophie, quant à lui, a élevé sa fille avec la maxime suivante : "Je voudrais que vous marchiez la tête haute et librement, même si c'est difficile". Quant à la devise de Sophie, elle est : "Un esprit fort et un cœur tendre". Sophie, juste avant de se trouver (tout comme son frère et un ami militant de la Rose Blanche) condamnée à mort, la nuit qui précède son procès, rêve d'un enfant qu'elle porte dans ses bras, et est vêtu d'une grande robe blanche. Une douce chaleur les environne. Soudain, une crevasse s'ouvre sous les pieds de Sophie, elle a le temps de poser l'enfant doucement à l'abri sur le bord, puis elle tombe, se sentant, dit-elle, libérée et sereine. Elle affirme : "L'enfant sauvé, rescapé, ce sont mes idées". L'exécution ayant lieu le jour-même, la matonne, pour marquer son désaccord avec le non respect des 99 jours légaux entre le jugement et l'exécution de la peine, décide d'enfreindre le règlement. Elle offre une cigarette aux trois jeunes condamnés. Mais, surtout, elle OUVRE LA GRILLE qui sépare Sophie de son frère et de leur ami. Trio, ou plutôt triade, trinité ; les trois jeunes gens réunis s'enlacent, posant symboliquement leur propre tête contre celle de leurs deux camarades, trois êtres intègres dont le dernier mot commun sera : "Ce n'était pas vain." Sophie Scholl, protestante (mais dont la religion ou l'athéisme ne comptent pas tant ici que sa soif profonde de justice) : sorte de Thérèse de Lisieux politique et humaniste. Sophie, emmenée par ses bourreaux, lorsqu'elle prend note que le droit de grâce ne lui a pas été accordé, visage extatique, s'émerveille : "Le soleil brille encore !" Quelques mois après la mort de Sophie et de ses deux compagnons, "La Rose Blanche", en avril 1943, jette des millions d'exemplaires d'un tract anti-fasciste écrit par des étudiants de Munich, ... du haut d'un hélicoptère. Soit la hauteur puissance X de celle depuis laquelle Sophie avait lancé les siens. Des tracts, qui, cette fois-ci, atteindront la Scandinavie et l'Angleterre. Et deviendront le terreau de nos consciences. ("Sophie Scholl, les derniers jours", rediffusion, pour ceux qui n'auraient pas vu ce film ou souhaiteraient le revoir, prévue sur Arte le lundi 11 octobre 2010 à 14h45.)

Viewing all articles
Browse latest Browse all 2

Latest Images





Latest Images